Ma bulle d'oxygène

Je vis mal cet imaginaire.

Je vis seulement des choses concrètes.

Je vis à  travers la plume des moments réels, des gens à l'existence proche de la mienne.

Je vis une chaussure noire à l'entrée de la pièce où nous sommes. A qui appartenait-elle ? A un homme c'est sûr, vu le modèle. Mais je ne vis que cela. Je vis mal un inconnu ou un assassin se présenter à la porte de la médiathèque sans motif. Je vis mal un homme venir jusqu'ici, attiré par notre activité hebdomadaire, poser le pied à l'entrée puis rebrousser chemin par timidité ou par crainte de se dévoiler.

Je vis mal comment, sans cette furtive apparition, j'aurais continué à écrire. Je vis dans le concret puisque j'ai commencé à faire travailler mon imaginaire à partir d'une chaussure.

Je vis un soir l'image d'une femme sur une photo. Je vis quelqu'un qui semblait perturbée par quelque chose, loin de l'ambiance festive qui paraissait régner autour d'elle.

Je vis un instant une autre femme et me posait beaucoup de questions à ce sujet.

Je vis qu'elle avait beaucoup changé et qu'elle était dans une bulle qui manquait d'oxygène.  Je vis en elle des rêves inachevés, des envies d'ailleurs.

Je vis une femme éprise et prisonnière de ses passions, de ses désirs de cocooning, juste histoire de s'offrir un peu de sérénité à travers ses mots ou les mots des autres, les écrivains, ceux qui la font basculer  dans un autre monde, à travers les pages d'un roman.