Ma bulle d'oxygène

Ma bulle d'oxygène

C'est une maison bleue

 

Ce n'était pas la maison bleue de Maxime LE FORESTIER mais je n'étais pas non plus à San Francisco. C'était quelque part en France, dans l'une de ces régions où l'on pouvait encore voir le ciel sans son plafond de pollution, où l'horizon n'était pas perturbé par la présence d'immeubles, où l'on pouvait voir le soleil levant et couchant, en restant assis sur un banc. Ce matin, je m'étais assise dans un fauteuil, devant le gîte où je vis depuis quelques jours. Il était 5 h 30, nous étions au printemps et j'avais ouvert les yeux pour la première depuis très longtemps. Là-haut, une couleur illuminait la nuit, le jaune, des milliers d'étoiles. La lune, pleine d'amour, veillait sur nous. Elle semblait nous sourire, tout en veillant sur ses petits, ses astres minuscules vus d'ici. J'étais restée un long moment à contempler ce paysage. Au fil des minutes, l'horizon changeait de couleur. Des pointes de bleu perçaient au loin, les teintes de l'aurore jaunes orangées apparaissaient et chassaient peu à peu l'obscurité de la nuit.

La nature reprenait son rythme, les oiseaux se réveillaient, les cloches des troupeaux au sortir des bergeries, tintaient au loin. Quelques bruits de moteur -les tracteurs et les camions de lait- perturbaient le silence. La vie recommençait.

Chaudement habillée, je décidais de prendre mon petit déjeuner dehors. Je ne me lassais pas de cette vision. Ces grands espaces m'enivraient et m'apaisaient en même temps. Je posais mon regard sur cette bâtisse de pierres que le propriétaire avait peinte en bleu. Surprenant en ce lieu mais qu'importe, j'y étais bien. L'intérieur était chaud en couleur. De nombreuses touches de jaune, accessoires ou décoration. C'était osé, mais le mélange était agréable à vivre.

Je ressortais avec un plateau et une surprise m'attendait. Un mouton était là, à quelques mètres du pas de la porte. Il portait une paire de lunettes bleue, comme les nageurs en piscine… Je regardais aux alentours. Personne. Ni homme, ni troupeau qui expliquait la présence de cet animal en ce lieu. Il paraissait plus égaré que dangereux … Il était là, planté sur ces pattes, bêlant tristement comme s'il me demandait de l'aide… Je décidais néanmoins de prendre mon petit déjeuner. Après tout, un mouton n'était pas comme un chien, il n'allait pas me quémander du pain ou du lait…

Il était resté immobile pendant que je savourais mon premier repas de la journée. Je lui en voulais un peu de m'avoir dérangé alors que j'avais décidé de déjeuner dehors pour regarder l'horizon  mais je ne m'étais pas occupée de lui. Je prévoyais de reprendre mon observation le lendemain … Une fois mes tartines avalées et mon thé terminé, je m'étais mise à observer ce mouton. Et oui, il était toujours là. Son poil était long et portait des tâches. Une forme plus ou moins ovale, d'un jaune citron ! Cela me rappelait des photos de transhumances, prise dans les drailles, ces chemins de montagnes qui menaient les troupeaux vers les pâturages ou encore ces publicités très colorées il y a quelques années pour une marque de vêtements.

Je continuais néanmoins mon observation de la nature, sans me préoccuper de la présence de l'intrus mais en ayant pris soin de lui donner de l'eau.

Quelques heures plus tard, un véhicule s'était présenté devant le gîte. C'était le propriétaire des lieux. Son fils avait fêté un peu trop son anniversaire la veille avec ses copains. Il avait prolongé sa soirée dans la nature sur le même thème que sa soirée. Une fête déguisée et maquillée. Alors sous l'effet de quelques verres d'alcool, il avait fait une blague à son père en utilisant un mouton qui était dans la bergerie. Celle-ci jouxtait leur maison en contrebas du gîte. L'animal habitué à la présence du jeune homme n'avait pas été inquiété lorsqu'il l'avait approché. Et là, il l'avait été peint en jaune et l'avait affublé de ses lunettes de piscine bleues.

A son réveil, j'imaginais que le jeune homme s'était rappelé des rêves bleus et jaunes et d'un mouton et il avait dû bondir de son lit pour avouer à son père sa mauvaise blague. Ce dernier avait sauté dans sa voiture bleue. L'urgence était de retrouver l'animal. La route qui menait de sa ferme à la route départementale passait derrière le gite et il avait aperçu son mouton. Celui-ci n'avait pas été bien loin et soulagement, il n'était pas blessé. L'homme  était venu s'excuser auprès de moi pour le dérangement et m'inviter à déjeuner chez lui le jour même. Il me présenterait sa femme et son fils et me proposa de me rapporter des produits de leur ferme pour la suite de mon séjour. Même si le mouton ne m'avait causé aucun désagrément, j'acceptais avec plaisir.

 

 

Lors du déjeuner, le fils me présenta ses excuses, très gêné des suites de sa folle soirée. La femme me fit visiter leur ferme et le local dans lequel il fabriquait leurs fromages. Surprise, le bâtiment était bleu à l'extérieur et jaune à l'intérieur…

Le soir, l'homme et son épouse me raccompagnèrent au gite et m'offrirent des fromages de leur production, des fruits et des légumes de leur jardin. Je poursuivis mon séjour durant quelques semaines, profitant de la beauté du site et des plaisirs que m'offrait la nature, au soleil et sous le ciel

 

 

 

 

 



12/03/2014
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